Traduction du Chant « MEGNU » : L’ALCOOL
Il n’y a rien de tel que la cupidité
Une fois que l’homme s’y enfonce
Il ne pense guère à se retourner
Voilà le mal d’aujourd’hui
Le père, quel rebut !
Devant un verre vide, il devient agressif
Se livre à tous les abus
Avec son visage aux traits excessifs
Pareil à un chien en rut
Il erre dans un quotidien convulsif
A la recherche d’une lie rancie
On se serait cru dans une ère de secrets salis
De retour des libations
Le père déroule un regard trouble :
Son œil gauche arbore le vert mortifère du mamba
Boursouflé, l’autre attend tapi dans le trou du boa
Au petit matin, il sort des beuveries
Le pied plein de menace
Qui, bagarreur et destructeur
Infligera bientôt mille sévices à la famille bafouée
Nus et affamés, les enfants souffrent de ses ripailles
Ils sont aussi beaux qu’une colonie de puces d’eau
Remplissent leurs journées de larmes de supplice
Miroir d’un père
Qui boit à la source de l’inconscience
Dieu du ciel !
A quoi rime cette manœuvre ?
Sur terre, guerre et morts sont légions
Nous nous abreuvons d’holocaustes
Par ton fait, est-ce bien raisonnable ?
Toute cette frénésie tient de la démence
Qui nous pousse au marché de l’infortune
Où nous combattons le Bien à la massue
Et assassinons la vie à coups de gourdin
Allant, massant, ressassant ma déveine
Je regarde les eaux du ruisseau
Qui emportent ma silhouette aux gémonies
Et me voilà à jamais privé de la femme rêvée
Elle s’en est allée dans les contrées souterraines
Où Thanatos attend debout sur son trône atroce.
Source: Marc MVE BEKALE, Pierre Claver Zeng et l’art poétique fang,
esquisse d’une herméneutique, Paris, l’Harmattan, 2001, pp. 154-155.